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Agent de sécurité : Zoom sur un métier peu valorisé

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Agent de sécurité : Zoom sur un métier peu valorisé

Vigiles, gardiens… C’est ainsi qu’on les appelait autrefois. Aujourd’hui, ils portent le titre d’agent de sécurité avec une fierté légitime. Leur job consiste à surveiller les bâtiments industriels, les banques, les propriétés privées, les bureaux… Mais aussi à transférer de l’argent en toute sécurité, voire à intervenir en urgence. Du coup, le métier est de plus en plus valorisé dans la société. Zoom sur les agents de sécurité.

Plusieurs compagnies de sécurité ont ouvert leurs portes à Maurice depuis quelques années. Leurs agents sont formés pour être polyvalents et intervenir afin d’assurer la surveillance et, évidemment, la sécurité d’un lieu. À Maurice, le secteur évolue. Si le métier attirait plus de vieilles personnes auparavant, jeunes et femmes sont aujourd’hui de plus en plus nombreux à embrasser la profession.

Certains agents de sécurité sont appelés à travailler 72 heures par semaine sur une base de deux « shifts » mais, bien souvent, pour un maigre salaire. Raison pour laquelle ce métier attire des retraités, qui cherchent à arrondir leurs fins de mois. Des syndicats sont cependant montés au créneau et militent pour la valorisation du métier d’agent de sécurité afin que de jeunes chômeurs puissent postuler.

Caudan Security Services emploie 800 agents de sécurité à travers le pays. Ils sont affectés dans trois différents départements : le gardiennage, le convoyage de fonds et l’intervention rapide. Selon un responsable de la compagnie, la fonction des agents de sécurité affectés dans le gardiennage est limitée à la surveillance et au contrôle d’accès. De fait, ils ne portent pas d’arme à feu, contrairement aux agents affectés au convoyage de fonds. « Vu qu’ils ont une mission particulière et importante, ces derniers ont une arme pour se préparer à toute éventualité. En ce qui concerne les agents affectés au département d’intervention rapide, ils effectuent des patrouilles régulièrement et interviennent quand une alarme se déclenche ou quand il y a une urgence », explique le responsable.

Les agents de sécurité du gardiennage et de l’intervention rapide sont appelés à travailler 12 heures par jour sur une base de deux « shifts ». Ceux du convoyage de fonds, eux, n’exercent que pendant la journée, entre 8 et 12 heures par jour, et ont au moins un jour de congé par semaine.

Chez Caudan Security, les candidats doivent répondre à plusieurs critères pour être recrutés, qui comprend la capacité de lire et d’écrire à la fois en anglais et en français. Ils doivent être en bonne condition physique et posséder un certificat de caractère valide. « Nous n’avons pas vraiment d’âge limite mais nous ne recrutons pas au-delà de l’âge de retraite », explique notre interlocuteur.

Une fois recrutés, les candidats devront suivre des formations, qui s’étalent sur une semaine. Elles ont principalement trait à leurs fonctions et le service clientèle en sus d’un cours de base de premiers soins. Pour ceux qui seront intégrés au convoyage de fonds et auront à porter des armes, ils devront suivre une formation sur leur utilisation. « Je précise qu’aucun novice n’est recruté. Soit il compte déjà plusieurs années de service dans le métier, soit il doit avoir fait ses preuves au sein de notre société. C’est alors qu’il sera considéré pour rejoindre l’équipe de convoyage de fonds », précise le responsable de la compagnie.

Pour assurer de bonnes conditions de travail, la société organise régulièrement des comités afin d’étudier les doléances et demandes des employés. La compagnie s’assure de respecter les normes légales, comme pour les personal protective equipment, conformes au Mauritius Standards Bureau. « Nous assurons d’offrir des uniformes et des chaussures de bonne qualité à nos employés », précise le responsable.« Les procédures passent par le CP »

Le métier d’agent de sécurité est gouverné par la Private Security Services Act (PSSA) 2004, une loi qui ne concerne pas seulement les travailleurs mais aussi les compagnies offrant ses services. L’inspecteur Shiva Coothen, du Police Press Office (PPO), indique que toute personne aspirant à devenir agent de sécurité doit envoyer une demande au commissaire de police. « Dans sa lettre, il doit faire mention de son souhait de devenir agent de sécurité et qu’il est apte à le faire. Ensuite, il aura à remplir un formulaire d’inscription, qui est disponible au Police Prosecution Office ou en ligne sur le site Web du gouvernement.

Il doit se munir d’une photo de type passeport, de sa carte d’identité, de son acte de naissance, d’une preuve d’adresse et, plus important, d’un certificat de moralité ainsi que d’un certificat pour démontrer qu’il a suivi une formation pour ce métier, approuvé par la Mauritius Qualifications Authority (MQA). Si l’aspirant agent de sécurité répond aux critères établis par la police, il obtiendra alors son permis, c’est-à-dire une “Registration card” », explique Shiva Coothen.

Les personnes désirant démarrer une compagnie de sécurité sont aussi appelées à remplir un formulaire. Elles doivent alors soumettre un plan de situation informant le lieu où la compagnie sera basée, leur BRN, un ainsi qu’un permis de la municipalité ou du conseil de district pour la construction de leur entreprise, entre autres. Par la suite, une enquête sera menée par la police sur la personne concernée pour recueillir des informations sur son comportement, les services qu’elle souhaite offrir, le nombre de personnes qu’elle projette d’employer, le type et la qualité d’uniforme que les travailleurs porteront, etc.

« Cette enquête est primordiale pour connaître le profil de l’individu qui souhaite ouvrir une compagnie de sécurité. Il faut savoir s’il a un casier judiciaire ou s’il a déjà eu des démêlés avec la police dans le passé. À partir de là, le commissaire de police prendra sa demande en considération », souligne Shiva Coothen. « Il y a des entreprises qui ne proposent que des services de surveillance et d’autres dont les agents vont utiliser des armes à feu. Donc, elles auront à adresser une demande pour une Firearm License. Les propriétaires de ces entreprises devront formuler une demande auprès du commissaire de police », précise-t-il.

Selon la Firearms Act 2006, toute personne qui possède une arme ou qui en porte une ne doit avoir aucun antécédent criminel. De plus, elle doit être saine d’esprit et être âgée de plus de 18 ans. « Il faut aussi savoir le type d’arme qui sera utilisée. Mais généralement, les compagnies de sécurité utilisent des revolvers. Nous devons aussi être informés du nombre d’armes et de munitions que la compagnie possédera et savoir comment ses armes seront préservées. De plus, l’agent de sécurité qui portera une arme devra postuler pour un “competency certificate” », soutient l’inspecteur.

En ce qui concerne la formation au tir, l’inspecteur Coothen indique que la compagnie doit fournir son propre formateur. De même que pour les cours de “self-defence”. La Mauritius Police Force (MPF) met à la disposition des apprentis agents de sécurité un champ de tir pour leur formation, vu qu’il n’y en a pas beaucoup. À noter que le formateur doit être approuvé par la MQA pour dispenser des cours de tirs.
Valorisation 
du métier souhaitée

Selon Jane Ragoo, de la Confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP), le métier d’agent de sécurité « mérite d’être valorisé », la définition même du métier ayant changé au fil des années. « Autrefois, on appelait ces travailleurs des gardiens. Aujourd’hui, ils sont connus pour être des agents de sécurité. Certes, il y a des agents dont la fonction se résume à la surveillance de bâtiments ou de propriétés. Mais il y en a d’autres qui sont appelés à porter des armes et à assumer des responsabilités plus importantes, comme d’exercer dans le convoyage de fonds », précise-t-elle.

Pour cette raison, la CTSP estime primordial d’accorder son importance à ce métier et de venir avec une réglementation. Sans quoi de moins en moins de personnes, surtout les femmes, seront motivées à travailler dans ce secteur. « Nous avons appris que le dossier est à l’étude. Nous espérons avoir de bonnes nouvelles prochainement. Mais nous ne comptons pas baisser les bras tant que nous n’obtiendrons pas ce que nous voulons », affirme la syndicaliste.

La CTSP a représenté les travailleurs du domaine de la sécurité devant le National Remuneration Board (NRB) pour protester contre leurs horaires de travail, soit de 72 heures par semaine. « Ce n’est pas possible que des agents de sécurité soient appelés à travailler 72 heures par semaine. D’autant que des femmes se lancent de plus en plus dans ce métier. Les travailleurs auront besoin d’un peu de temps pour eux et pour leur famille. Les responsables du NRB ainsi que des patrons ont été à l’écoute et sont en faveur de notre demande. Nous espérons trouver des changements. Si les heures de travail diminuent, encore plus de femmes pourront se lancer dans le domaine », explique Jane Ragoo. En ce qui concerne le salaire, Jane Ragoo avance qu’il a été réactualisé à ce jour. Donc, « aucun problème n’est à signaler » à ce sujet.

Témoinages

Bernard : « J’aime ce que je fais malgré le danger »

Bernard, 26 ans et agent de sécurité chez Brinks, se passionne pour son métier. Il compte déjà cinq années de service et a récemment décroché un prix pour avoir battu le record d’arrestations dans les supermarchés. « J’étais à la recherche d’un emploi et j’ai postulé chez cette agence de sécurité. Au fil des mois, j’ai réalisé que c’est un métier passionnant mais qu’il faut beaucoup de patience pour l’exercer. En tant que jeune, je suis enthousiaste et j’essaye d’accomplir avec perfection mes responsabilités », affirme-t-il.
Cependant, Bernard dit être conscient des dangers auxquels il s’expose. « J’en suis conscient, d’autant que j’opère dans un supermarché. Souvent, après avoir empêché un vol à temps ou après avoir arrêté un voleur, je reçois des menaces, parfois même de mort. Par ailleurs, il y a des gens qui nous agressent verbalement. Heureusement, à ce jour, il n’y a pas eu d’agression physique », avance Bernard.
Le jeune gardien soutient qu’il est appelé à travailler pendant les intempéries également. « Si le pays est en alerte cyclonique, nous devons rester sur place tant que l’alerte n’est pas enlevée. Mais malgré tout, j’aime ce que je fais. »

Parwez : « Notre 
sécurité assurée »

Parwez, 50 ans et employé chez Edmond Security, exerce comme agent de sécurité depuis un an. « Je vivais en Angleterre et quand je suis rentré à Maurice, j’étais à la recherche d’un emploi. C’est ainsi que je suis devenu agent de sécurité », dit-il. Selon Parwez, depuis qu’il pratique ce métier, dit ne jamais s’être senti en danger. « Là où nous travaillons, nous sommes dans un lieu sûr », dit-il. Parwez garde un bâtiment très connu à Port-Louis. « Nous avons notre petit endroit pour nous asseoir. Nous effectuons notre patrouille mais, quand il y a des pluies torrentielles ou un cyclone qui s’abat sur le pays, nous restons à l’intérieur. Donc, nous sommes en sécurité, loin de tous dangers. Sauf s’il y a une personne qui se comporte mal devant le bâtiment. Là, nous appelons la police. »

Selon la loi du travail…

Selon les Security Guards (Remuneration Order) Regulations 1986, le terme « agent de sécurité » désigne tout individu employé par une personne titulaire d’un permis en vertu de l’article 20 de la Police Act pour agir et fournir des services de sécurité et de protection d’une propriété. Il doit aussi pouvoir protéger les structures industrielles, les entrepôts ou d’autres biens contre tous dangers, vol et infraction ; effectuer des visites d’inspection dans des bâtiments et des terrains et enregistrer les entrées requises ; surveiller les personnes ou les activités suspectes ; transporter ou garder des messagers transportant des objets de valeur à destination et en provenance des banques ou d’autres établissements ; enquêter sur les cas de vols à l’étalage, le vol, la malhonnêteté ou toute autre conduite indésirable parmi les employés ou les clients des établissements commerciaux ou organisations privées et rédiger des rapports d’enquêtes.

Selon la loi du ministère du Travail, l’agent de sécurité doit travailler 12 heures, comprenant le temps alloué pour les pauses repas et le thé. Le Remuneration Order fait aussi mention qu’aucun travailleur ne peut travailler plus de six jours consécutifs.
Les employés dans les agences de sécurité ont droit à une pause déjeuner d’une heure et deux pauses-café de dix minutes chacune, mais celles-ci doivent être prises sur leur lieu de travail. Ils ont aussi droit à au moins un jour de repos un dimanche par mois. Les employeurs doivent s’assurer que les travailleurs ont une chance égale sur le « shift » du soir et du matin.

Un agent de sécurité qui travaille pendant un jour férié doit être rémunéré pendant les 12 premières heures au double du taux de base et, par la suite, au triple du taux de base. Un agent dont les charges de travail sont plus que celles d’un jour normal, autre qu’un jour férié, est rémunéré à une fois et demie le taux de base à l’égard des heures supplémentaires de travail qu’il effectue.
Si un agent de sécurité est appelé à travailler alors que le pays est en alerte cyclonique de classe III ou IV, il doit, en plus de toute rémunération qui lui est due, avoir droit à une indemnité équivalant au moins trois fois le taux de base pour chaque heure que le travailleur reste sur son lieu de travail.

Grille salariale
Les agents de sécurité bénéficient d’un salaire de Rs 8 874,75 la première année de leur entrée en service. Pour les années suivantes, ils perçoivent :
Rs 8 972,50 (2e année), Rs 9 038 (3e), Rs 9 117 (4e), Rs 9 184,25 (5e), Rs 9 290 (6e), Rs 9 390 (7e), Rs 9 491 (8e), Rs 9 643,25 (9e) et Rs 9 762,50 (à partir de la 10e année). À noter que ces salaires excluent la compensation salariale de Rs 360. Le salaire d’une nouvelle recrue s’élève ainsi à Rs 9 234,75 alors que celui d’un agent de sécurité comptant dix années de service atteint les Rs 10 122,50.

CONFLIT INDUSTRIEL: Un ex-vigile dénonce une réduction de son « lump sum »
Aboo Bakar Mungar, un habitant de Pailles, se bat depuis l’année dernière pour obtenir la somme que sa compagnie lui doit encore. Selon cet ancien agent de sécurité, la compagnie qui l’employait aurait eu recours à « une ruse » pour ne pas lui donner la totalité de la somme due. Le ministère du Travail a été alerté sur la question mais les procédures durent toujours.

Aboo Bakar Mungar a pris sa retraite en mars de l’année dernière. Il a travaillé comme agent de sécurité pendant 18 ans au sein d’une compagnie très connue dans le secteur. Selon lui, il y aurait un manque de Rs 40 000 sur le “lump sum” qu’il a reçu. Chiffres à l’appui, il a porté plainte au ministère du Travail. « Les officiers m’ont dit qu’effectivement il y a une erreur. Toutefois, on m’a fait comprendre que les procédures sont toujours en cours en vue de régler cette affaire. » Le sexagénaire affirme aussi qu’il lui a été conseillé de porter l’affaire en cour. Mais il n’a pas les moyens nécessaires pour le faire. D’où ses allées et venues au ministère dans l’espoir de trouver une solution. « Savez-vous combien de temps j’ai travaillé au sein de cette entreprise, nuit et jour, même pendant les cyclones ? Et voilà ma récompense aujourd’hui. »
Il reproche également à la compagnie de lui avoir repris son permis d’agent de sécurité. Ce qui, selon lui, est illégal.

Cependant, selon les informations glanées par le ministère du Travail, la compagnie aurait calculé sa prime selon un arrêt maladie au lieu de la retraite. Selon elle, Aboo Bakar Mungar aurait quitté la compagnie trois mois avant l’âge de la retraite, ce qui, selon le principal concerné, serait « une ruse ». Actuellement, il multiplie les démarches auprès des autorités pour plaider son cas. Il signifie également son intention de porter plainte contre un médecin travaillant pour la compagnie, qui aurait émis un « faux certificat médical » à son égard, selon lui.