Penser trop n’est pas une maladie. Christel Petitcollin sera bientôt à Maurice pour l’expliquer. Invitée à participer à plusieurs conférences sur l’hypersensibilité et la suractivité/surefficience mentale, l’auteure des best-sellers « Je pense trop » et « Je pense mieux » répond à nos questions. À savoir qu’il reste encore quelques places avant la première conférence, le 27 septembre.
Il s’agit de votre première visite à Maurice en tant que conférencière. Comment vous est venue l’idée de donner ces conférences ici ?
C’est le Dr Sandra Stallaert, qui vit et travaille à Maurice, qui m’a invitée. Elle m’a entendue en conférence en Suisse et elle a pensé que les sujets de la surefficience mentale et de l’hypersensibilité intéresseraient les Mauriciens. Je crois que beaucoup de gens dans sa clientèle présentent cette particularité. Je la remercie d’avoir organisé ma venue et je suis ravie d’aller à la rencontre des hypersensibles pour leur donner des clés de gérer leur émotivité.
Qu’attendez-vous des Mauriciens qui assisteront à vos conférences ?
Qu’ils découvrent et comprennent le fonctionnement mental des gens « qui pensent trop » et que ceux qui pensent trop aient des pistes concrètes pour apprivoiser ce cerveau bouillonnant. Mais ce n’est pas à moi d’avoir des attentes. Je suis venue proposer un contenu et j’espère que c’est moi qui répondrai aux attentes des Mauriciens.
Expliquez-nous ce qu’est la surefficience mentale ?
La surefficience mentale est avant tout une particularité neurologique. Il s’agit d’un cerveau atypique dont le fonctionnement est encore mal connu. Les perceptions sensorielles sont plus aiguisées : on parle d’hyperesthésie. Les pensées sont organisées de façon arborescente : on parle de pensée complexe. Et de ces fonctionnements de base découlent une sensibilité, une émotivité, une affectivité, une psychologie et tout un système de valeurs différentes.
Comment peut-on « diagnostiquer » un individu « surefficient mental » ? Existerait-il un phénotype ?
Pour l’instant, il n’y a pas de test spécifique. Ces personnes atypiques sont sous-diagnostiquées et séparées dans des cases : HP, Dys, TDAH…. Alors qu’il semble qu’elles ont beaucoup de points communs. Il n’existe que des tests de QI, qui sont très incomplets et peu adaptés pour cerner certains aspects de ce fonctionnement. Mais les neurosciences s’intéressent de plus en plus au phénomène et les recherches avancent à grands pas. En attendant, mon livre Je pense trop pourrait servir de test. Ses lecteurs se retrouvent complètement dans le portrait-robot que je leur propose, au point que certains m’ont écrit pour dire : « Ce n’est pas poli de lire dans ma tête ! » ou « J’ai arrêté de surligner votre livre, il devenait fluo ! »
On associe cela trop souvent à une maladie, selon vous ?
Oui, on parle trop de « trouble » ou de « dysfonctionnement » en parlant des surefficients. Il s’agit certes d’une minorité de personnes, entre 10 et 20% de la population. Pour autant, les surefficients ne sont pas déficients. Mais les « normo-pensants » (c’est le nom que j’ai donné à ceux qui pensent dans la norme) ont tendance à s’ériger en modèle et à considérer ce qui est différent d’eux comme un problème. Cette façon d’aborder le phénomène est heureusement en train d’évoluer positivement.
Quand ce trop-plein d’énergie, d’émotions devient un fardeau pour la personne, que doit-elle faire ?
Je donnerai effectivement lors des conférences des pistes très concrètes pour gérer ce « trop-plein ». Mais la première piste reste avant tout de s’accepter comme on est, de le revendiquer et d’arrêter de se forcer à être différent.
Vous parlez dans votre ouvrage « Je pense trop » de pervers narcissique, entre autres. Pourquoi ?
Je ne parle jamais de « pervers narcissiques » mais de manipulateurs (et de manipulatrices !). Les manipulateurs utilisent beaucoup l’émotivité – qui fait perdre ses moyens intellectuels –, le chantage affectif – qui bouleverse, la culpabilisation – qui fait se remettre en cause, entre autres. Ce sont autant de points qui fonctionnent trop bien chez les gens qui pensent trop. C’est pourquoi les personnes hypersensibles sont malheureusement des proies idéales pour les manipulateurs. Beaucoup de mon travail de coaching consiste à aider les gens qui pensent trop à s’affirmer davantage dans leurs relations. J’ai même écrit un livre entier (« Pourquoi trop penser rend manipulable ») pour expliquer comment les surefficients se font paradoxalement piéger par leur propre intelligence.
La neurolinguistique est un domaine vaste, qui est en constante évolution. Comment est née cette passion chez vous ?
L’auteur Richard Bach dit « on enseigne le mieux ce qu’on a le plus besoin d’apprendre. » Je crois que c’est parfaitement exact en ce qui me concerne. Nous sommes tous des handicapés de la communication. Nous ne savons ni écouter ni dire les choses simplement, et encore moins gérer les conflits sans nous blesser réciproquement. J’ai trouvé un tel confort personnel en apprenant ces techniques aussi simples que puissantes ! J’ai eu envie de partager mes découvertes pour le bien-être de tous. La communication est une matière aussi vivante que fascinante.
Finalement, que diriez-vous aux surefficients mentaux qui viendront vous écouter en septembre ?
Vous êtes parfaits comme vous êtes ! Ne changez rien, apprenez juste à gérer.
Et vous, pensez-vous trop ?
Oui, je fais partie de cette catégorie neurologique. C’est sans doute pour cela que j’ai pu aller à la rencontre de cette population hypersensible. Ma pensée complexe arborescente pouvait cerner la leur. Pour autant, je ne considère pas que je pense trop, parce que j’adore penser. Je n’en ai jamais assez de toutes ces idées qui me traversent la tête. J’en voudrais même bien encore quelques-unes en plus.