Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana qualifiés, les requêtes pour fraudes rejetées: la Haute Cour constitutionnelle a confirmé mercredi le second tour de la présidentielle à Madagascar en décembre et exhorté les ex-chefs d’Etat et frères ennemis depuis la crise sanglante de 2009 à « éviter les provocations ».
« Les deux candidats suivants sont autorisés à passer au second tour, Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana », a déclaré le président de la Haute Cour constitutionnelle (HCC), Jean Eric Rakotoarisoa, lors de la cérémonie de proclamation des résultats définitifs du premier tour de la présidentielle organisé le 7 novembre.
Andry Rajoelina est arrivé en tête du premier tour avec 39,23% des suffrages, devant Marc Ravalomanana (35,35%), selon les chiffres publiés par la HCC.
Pas assez donc pour s’imposer dès le premier tour, où 50% des suffrages était requis.
Un autre ancien président, Hery Rajaonarimampianina, est lui éliminé de la course. Il est arrivé en troisième position, très loin derrière les qualifiés, avec seulement 8,82% des voix.
Le second tour sera organisé le 19 décembre dans cette grande île de l’océan Indien, extrêmement pauvre malgré ses nombreuses richesses naturelles (saphir, or, vanille, bois de rose…).
La HCC a confirmé mercredi – au dixième près – les résultats du premier tour publiés par la Commission électorale nationale indépendante (Céni), qui avait été fortement critiquée par les candidats.
Elle a en outre rejeté toutes les requêtes dont elle avait été saisie, notamment la demande d’Hery Rajaonarimampianina d’annuler le premier tour. Andry Rajoelina avait lui accusé Marc Ravalomanana d’avoir acheté des électeurs le jour du scrutin et dénoncé le logiciel « truqué » de la Céni.
« La Haute Cour constitutionnelle a accompli son travail selon l’équité et la droiture », a insisté mercredi à Antananarivo Jean Eric Rakotoarisoa, vêtu de la traditionnelle toge rouge et blanche des juges de la HCC.
« Il n’y a pas de magie dans une élection », a-t-il ajouté, appelant au calme dans ce pays coutumier des crises politiques.
« Aux deux candidats: évitez les provocations. Le peuple malgache n’a pas besoin de trouble », a-t-il prévenu.
Revanche.
Andry Rajoelina, au pouvoir de 2009 à 2014, a été le premier à réagir à l’annonce de la HCC, pour accepter les résultats et tendre la main aux électeurs indécis.
« Je me tourne vers ceux qui sont encore indécis, je vous ouvre mes bras, travaillons ensemble pour sauver Madagascar », a-t-il lancé depuis la HCC. « Nous allons passer au deuxième tour », a-t-il assuré devant la presse.
Le parti HVM de Marc Ravalomanana (2002-2009) a aussi respecté la décision de la HCC.
« C’est le résultat officiel. Tout bon citoyen doit s’y soumettre et c’est ce que nous allons faire », a assuré Ndrantonomena Rakotonanahary, coordonnateur du HVM dans la région d’Antananarivo.
Le second tour aura un parfum de revanche pour Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, au coeur d’une grave crise politique en 2009 qui s’était soldée par la mort d’une centaine de personnes et la démission forcée du président Ravalomanana.
L’armée avait alors confié au jeune opposant Rajoelina les clés du pouvoir.
Les deux hommes avaient ensuite été interdits de se présenter à la présidentielle de 2013, afin d’éviter des troubles.
Aucun incident n’a été signalé lors du premier tour de la présidentielle de 2018. La campagne a également été calme, mais elle a été marquée par une débauche de moyens des anciens présidents candidats, en premier lieu Andry Rajoelina, dans un pays où près de 80% des habitants survivent avec un budget quotidien de moins de 2 dollars.
Marc Ravalomanana, 68 ans, ex-livreur de lait à la tête d’un empire agroalimentaire, et Andry Rajoelina, 44 ans, ancien organisateur de soirées reconverti dans la publicité, disposent tous les deux de télévisions.
Ils ont distribué à profusion des casquettes et tee-shirts et se sont déplacés en hélicoptère pour faire campagne dans un pays aux infrastructures routières délabrées.
Les fonds de campagne ne sont pas plafonnés à Madagascar, qui pointe à la 155e place sur 180 du classement de perception de la corruption de l’ONG Transparency International.
Source : AFP