Le viol, la malnutrition, le sida, le travail forcé dans les groupes armés : aucun de ces maux n’épargne les enfants de Centrafrique en conflit, dont deux sur trois, soit 1,5 million, ont besoin d’assistance humanitaire, selon l’ONU. «On a l’habitude de dire que la Centrafrique est l’un des pays les plus difficiles pour être un enfant», explique Donaïg Le Dru, porte-parole de l’Unicef en Centrafrique.
«Aujourd’hui, la vie est peut-être encore plus difficile et plus dangereuse pour les enfants qu’elle ne l’était au plus fort de la crise» il y a 5 ans, note un rapport de cette organisation sur la situation des enfants de Centrafrique, publié le 30 novembre et intitulé «Une urgence négligée». Le texte constate «une forte recrudescence des combats, qui se sont étendus à des régions du pays auparavant épargnées par la violence» et s’inquiète des conséquences pour les enfants dans un pays déjà dépourvu de tout. Selon des chiffres de l’ONU, l’espérance de vie y est de 52 ans, trois personnes sur 5 vivent avec moins de 1,9 dollar par jour et près de la moitié de la population n’a pas accès à l’eau potable. L’enfance n’est pas épargnée par ces statistiques alarmantes: la mortalité néo-natale y est la plus élevée au monde avec 1 enfant sur 24 qui meurt dans les 28 premiers jours de sa vie. Le nombre d’enfants atteints de malnutrition sévère ou aigüe est passé de 32 348 à 43 000 entre 2014 et fin 2018.
Groupes armés
L’hôpital de Bangui est le seul du pays à disposer de pédiatres, au nombre de cinq, les régions, en grande partie sous la coupe de groupes armés, étant totalement démunies en équipements et personnel. Dans l’unité dédiée à la lutte contre la malnutrition, les pleurs d’enfants décharnés marquent l’heure de la pesée. Tour à tour, les 61 enfants qui s’y trouvent, aux côtes parfois saillantes, sont placés sur une balance pour surveiller l’évolution de leur poids. En général, l’hospitalisation dure 8 jours. Le recrutement forcé par les groupes armés est un autre fléau pour les enfants centrafricains: 14 000 ont été recrutés par ces groupes depuis 2012, selon l’ONG Child Soldiers International. Inutile de sortir de la capitale pour constater la réalité de ces chiffres. Dans le quartier commerçant à majorité musulmane du PK5 à Bangui, régulièrement frappé par des violences, les checkpoints informels des milices dites «d’autodéfense » sont souvent occupés par des enfants, joint aux lèvres et kalashnikov à la main.