Le député du Parti travailliste Osman Mahomed dit avoir des appréhensions au sujet de la capacité énergétique du pays avec l’absence de projet concret en ce sens depuis les élections de décembre 2014. « Aucune “letter of award” n’a été accordée de manière concrète par le gouvernement », affirme le député rouge de la deuxième circonscription de Port-Louis.
Vos commentaires sur le projet controversé de “Combined-Cycle Gas Turbine” du Central Electricity Board ?
Le gaz n’est pas une mauvaise chose pour Maurice. Le charbon nous cause un problème majeur avec les cendres. J’ai eu l’occasion de présider les auditions de la National Energy Commission avec des plaintes au sujet de la disposition de ces cendres. Et puis, il y a des inconvénients découlant des émissions. Dans l’ensemble, le projet CCGT semble bon. Il y a une différence économique entre l’Open-Cycle Gas Turbine et le CCGT. Le Public Sector Investment Program (PSIP) 2017-2018 a prévu Rs 8,9 milliards pour ce projet. On a eu le rapport de Poten and Partners en ce qui concerne la viabilité de ce projet, intitulé « Adoption of LNG in Mauritius ». Mais il faut souligner que les procédures entourant ce projet avaient déjà eu lieu avant même que le rapport ne soit rendu public. Les “ins and outs” du projet restent flous. Et puis, il y a eu les allégations de malversation à l’encontre de la firme grecque. On a aussi un comité ministériel qui se penche sur ce projet présidé par nul autre que le ministre de tutelle, le Deputy Prime Minister, Ivan Collendavelloo. Je pense personnellement que c’est un autre ministre qui aurait dû présider ce comité avec un regard objectif et indépendant. J’ai été surpris dernièrement d’apprendre que le coût du fioul seulement sera de Rs 8 par unité d’électricité du CCGT qui n’est pas le “levelized cost of electricity” qui sera plus conséquent.
Quelle est votre opinion sur la collaboration entre Maurice et le Mozambique sur le Liquified Natural Gas (LNG) ?
Pour le moment, le Mozambique fournit seulement l’Afrique du Sud. Quand est-ce qu’on va démarrer des choses concrètes pour Maurice et à quels prix ? Ce sont des questions cruciales pour l’avenir énergétique du pays. Ce gouvernement se contente d’effets d’annonces depuis le début de son mandat. Ki hub ki nou pan tande ek sa gouvernma-la ?
Quelle est votre analyse en ce qui concerne la capacité énergétique du pays ?
Je suis inquiet pour l’avenir énergétique du pays. À ce jour, nous n’avons aucune “letter of award” sur un projet ferme de production d’électricité pour le pays. En d’autres mots, zéro projet concret en plus de quatre ans au pouvoir et avec les élections qui approchent… La production de l’électricité est dans l’impasse. Le CCGT est massif avec 120 à 140 mégawatts alors que la capacité nationale du pays est d’environ 600, mais le contrat alloué à METKA a été annulé et on est « back to square one ». À quelques mois des élections, le gouvernement n’a rien de concret que ce soit en termes de production ou d’approvisionnement en gaz. C’est maintenant qu’on entame des discussions. Aussi, le gouvernement a failli lamentablement en ce qui concerne le projet de ferme éolienne à Plaine-Sophie, un projet du plan d’action de Maurice Île Durable. Nous n’avons malheureusement aucune visibilité en ce qui concerne la production de l’électricité par le secteur privé. Nous allons poser des questions sur la production d’électricité à la rentrée parlementaire. La situation est inquiétante.
Et la consommation énergétique du métro dans vos calculs ?
Nous sommes sur une corde raide en termes de consommation énergétique. Cependant, si nous avons assez de mesures d’efficience énergétique ainsi que de réduction, je pense qu’on pourra survivre jusqu’aux prochaines élections et un nouveau gouvernement prendra de nouvelles décisions et apportera des solutions qui s’imposent.
Justement quel regard jetez-vous sur le projet Metro Express à ce jour ?
C’est clair et confirmé qu’on aura un tramway qui sera en compétition directe avec le trafic routier. Nous allons avoir une cacophonie à Beau-Bassin. Le déplacement de la promenade Roland Armand derrière le CEB de Rose-Hill n’est pas approprié avec les câbles de haute tension qui s’y trouvent. On ne peut y aménager un nouveau parcours de santé dans cette zone. Le rond-point de Beau-Bassin sera très mouvementé. S’il n’y a pas une synchronisation parfaite, ce sera un désordre total. On aurait dû avoir des “elevated structures” sur cette partie, qui est très utilisée par les automobilistes. Mais le gouvernement a choisi autrement. On a voulu montrer qu’on a baissé le coût du projet pour des raisons politiques. Mem si ti bizin depans inpe plis ti bizin fer li.
Vous avez aussi émis des réserves sur le projet Safe City au Parlement. Pourquoi ?
Plusieurs zones d’ombre planent sur le projet de Safe City. On a été témoin des cas de fraude qui rongent la compagnie Huawei au niveau international. Vu que Huawei est associée à un projet d’intérêt national, nous devons suivre la situation de près. Quelle est la différence entre les caméras Huawei et la carte d’identité biométrique ? L’on sait quel parti et quel leader politique avaient fait campagne contre la carte biométrique et maintenant c’est pire avec l’élément de “facial recognition”. Les caméras n’auront pas besoin de permission pour capter votre photo et mémoriser votre physionomie.
Sur le plan politique, comment voyez-vous la prestation gouvernementale à quelques mois des élections ?
Lalyans Lepep avait promis beaucoup de choses en 2014 avec l’accent sur un second miracle économique et le nettoyage des institutions du pays. Ce gouvernement n’a pas de bilan à ce jour. Nous n’avons pas eu de miracle économique comme annoncé mais des mesures populaires au risque de mettre l’économie du pays en péril pour se faire réélire. Nous avons eu exactement le contraire du nettoyage annoncé. Euroloan/Goldfinger, Bal Kouler, Lalangate, BAI, Heritage City, Soodhun et ses frasques, Yerrigadoogate, le rapport Lam Shang Leen avec les cas de Roubina Jadoo-Jaunbocus, Raouf Gulbul et Sanjeev Teeluckdharry, l’épisode Biskwi Hanoomanjee et c’est maintenant qu’on vient nous dire que Terre Rouge-Verdun sera livré dans 100 jours, la réparation de l’autoroute ayant pris deux fois plus de temps que sa construction. Ce pays collectionne des scandales depuis décembre 2014. Le deal Papa-Piti est une trahison du souhait de l’électorat qui a chaque fois choisi démocratiquement son Premier ministre. Il faut être aveugle pour ne pas voir que c’est un gouvernement totalement discrédité. Ceux ayant débuté ce mandat comme ministres, Deputy Speaker ou encore PPS ne sont plus là. Le pire gouvernement que ce pays ait connu.
Et si Pravind Jugnauth l’emporte au Privy Council, le MSM ne sera-t-il pas requinqué ?
Politics is about bread and butter. Est-ce que le Mauricien se sent mieux ? Est-ce l’avenir des jeunes est plus brillant ? Est-ce que nous avons moins de scandales et de fraudes ? Ce sont là les questions cruciales que le peuple prendra en considération. Que Pravind Jugnauth soit blanchi ou pas, cela n’enlève rien à l’impopularité de son gouvernement et de ses ministres. Qu’il s’en sorte ou pas n’efface pas tous les copinages politiques, les cas flagrants de népotisme qu’on a connus durant ce mandat. Au contraire, le peuple mauricien aura l’occasion de montrer au leader du MSM s’il a accepté la passation de pouvoir entre sir Anerood Jugnauth et lui.
Navin Ramgoolam traîne toujours avec ses casseroles aussi ?
Les affaires de Ramgoolam en cour sont “subjudice”. Mais pour le moment, il n’a pas connu de condamnation, contrairement à Pravind Jugnauth. Donc, laissons les choses légales suivent leurs cours.
Quelle est votre opinion du leadership du PTr qui semble diviser l’establishment du parti ?
Il y a beaucoup de propagandes du côté des adversaires politiques pour empêcher le PTr de reconquérir le terrain politique. Le PTr est un parti durable. Je reste confiant que l’échiquier politique évoluera rapidement cette année. La question de leadership politique s’applique à tous les partis. Navin Ramgoolam, selon moi, est victime d’un acharnement pour des raisons évidentes. La priorité politique est de faire partir au plus vite ce gouvernement pourri.
Osman Mahomed est-il prêt pour un renouvellement de mandat au No 2 à Port-Louis ?
La politique est pour moi une université. Je me suis impliqué à plein-temps dans ma circonscription et au Parlement. J’ai essayé d’être au service de mon électorat qui m’a soutenu malgré la victoire de Lalyans Lepep en 2014. J’espère que mes mandants prendront cela en considération.