La culture du maïs représente un atout économique et culturel dans le quotidien de Rodrigues. Mais la découverte de la présence dévastatrice des larves de “full army worm”, communément appelées chenilles légionnaires (ou légionnaires d’automne), est venue tout remettre en question dans l’île. Les planteurs de maïs s’interrogent sur l’introduction de cette peste nuisible dans l’île et tentent de conjuguer leurs activités en faisant abstraction de l’apport de ces activités économiques. Les larves avaient été détectées en premier dans des champs à Pistache et à Eau-Claire depuis le 22 mars, soit avec le passage de l’intense cyclone tropical Joaninha.
La réalité du jour est que l’insecte venu d’Amérique centrale et latine, qui s’est d’abord fait connaître à la fin de l’année dernière à La Réunion, a poussé Rodrigues à la mise sous quarantaine. C’est une des raisons pour laquelle un expert de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation de l’agriculture, la Food and Agricultural Organisation (FAO), a été dépêché à Rodrigues pour une mission d’envergure et cruciale.
Les chenilles légionnaires ont un certain nombre de caractéristiques qui les rendent particulièrement difficiles à contrôler. Elles peuvent ainsi se reproduire à un taux élevé et développer une résistance rapide aux pesticides. Suite au passage du cyclone Joaninha, l’agriculture à Rodrigues est à genoux. Les champs de maïs, de melons d’eau et d’oignons ont été particulièrement affectés. Pas seulement par le passage du cyclone, mais aussi par la présence de ladite chenille.
À Camp Paul, le champ de maïs de Ton Dang ressemble à tout sauf à un champ de maïs. Littéralement, il ne reste plus rien, car les larves sont passées par là. « Dimounn Rodrig bizin plant may. Ena dimounn ki depann lor la pou viv. Mo dakor avek gouvernman ek so lide pou pa plant maye pandan enn period letan, me bizin trouv enn fason pou ed sa bann planter-la. Me o dela de sa, mem apre fini eradike plantasion may, eski sa cheniy-la pou atak lot plantasion ? » fait-il comprendre sur un air des plus désabusés.
À Anse Quitor, de l’autre côté de l’île, la plantation de maïs d’Emmanuel Legentil n’a pas meilleure mine. « Pa fasil ditou ek sa siklonn kinn pase la. Perdi karo may net. E ladan pa zis siklon, ena enn bebet ki pe fer ravaz, pe detrir tou may. Pa pe kone kouma pou fer ek sa. Nou pe espere ki bann lotorite pou trouv enn solision, sinon may fini dan Rodrig », dit-il.
Une série de mesures ont été annoncées par les autorités concernées afin d’endiguer la prolifération de ce ravageur, qui peut être une nuisance pour la culture maraîchère de Rodrigues. Le commissaire de l’Agriculture, Richard Payandee, maintient ainsi qu’il faudrait détruire les champs de maïs affectés par la chenille en les brûlant, et qu’il ne fallait pas y cultiver cette céréale avant janvier 2020. Mais des voix se sont élevées pour faire ressortir que si les champs affectés sont détruits par le feu, la chenille, elle, se déplacera dans d’autres plantations.
De son côté, le ministre de l’Agro-industrie, Mahen Seeruttun, estime impératif de trouver les moyens de détruire la chenille dans un délai raisonnable. Et ce avec l’aide des experts. Il souhaite aussi que le système de contrôle de biosécurité dans les points d’entrée soit renforcé. Entre-temps, seni pe manz may Rodrig !