ZIBYA ISSACK
Il y a de ces gens qui laissent une cicatrice après leur mort et d’autres qui laissent une trace. Pour moi, Shakuntala Boolell fait partie de ces gens qui laissent un vide. Shaku, ainsi qu’on l’appellait entre amies à l’université de Maurice, représentait à nos yeux, une femme étonnante qui exprimait ouvertement son opinion. Franche et directe, cette universitaire se contentait de peu pour être heureuse et pour combler ses étudiants. Sévère, sans pour autant être autoritaire, elle nous lançait souvent un regard chargé d’audace ou de courage.
On ne badine pas avec l’amour comme on ne badine pas avec Shaku. Avec elle, la littérature prenait une autre dimension. Elle nous apprenait à ressentir la vie à travers ses différentes analyses. Cette grande dame était à la fois littéraire et féministe dans l’âme. Elle nous aidait à prendre conscience de notre condition de femme; notre être, notre force intérieure, notre dignité, notre devenir. Elle nous avait aussi appris à prendre soin de notre sensibilité face à la vie et aux loups qui nous entourent… Mon ami Sedley Assonne le précise d’ailleurs dans un beau billet publié sur Facebook: “Si elle avait publié ‘La femme enveloppée’, un recueil de nouvelles, Shakuntala n’était en aucun cas, une femme introvertie. D’ailleurs, à l’instar des personnages qu’elle avait créés dans ce livre, elle était pour la libération totale de la femme, qu’elle soit hindoue, musulmane, créole ou autre”.
Je n’arrive pas à croire que je conjugue aujourd’hui Shakuntala Boolell au passé. Si la vie est une succession de fins et de débuts, cela ne signifie pas pour autant que nous sommes préparés à dire adieu aux gens que nous aimons et qui ont laissé plus qu’une trace…