Michael Chang et Jean-Paul Cerdor ont fait partie des DJ les plus populaires du night-clubbing mauricien dans les années 90. Aujourd’hui quinquagénaires dynamiques, ils ont encore de la souplesse dans les doigts pour lancer un wool-up à scotcher les plus jeunes du deejaying. Le duo de DJ Best revient derrière les platines ce 27 avril pour renouer avec les années 80 et titiller les nouveaux sons au Docks Lounge du Caudan.
Qui de mieux que des DJ quinquas pour mixer les plus grands standards des années 80 et vous faire groover sur les sons des 90’s que les Golden boys des platines de l’époque eux-mêmes ? Les moins de 20 ans et les night-clubbers d’aujourd’hui, qui n’ont pas connu le temps où le duo Michael Chang et Jean-Paul Cerdor (DJ Best) régnait dans la cabine du Queen’s Club et qui pensent avoir tout entendu des sons des eighties, vont devoir se remettre en question. Et on sait de quoi on parle ! Les King du mix débarquent et sont décidés à occuper la place. Les dates sont déjà bouclées. La première sortie du 27 avril au Docks Lounge du Caudan devrait servir d’avant-goût. Back on the track to rock, les deux amis DJ ne sont pas uniquement nostalgiques du passé. Ils croient fermement qu’ils ont encore des arguments dans les doigts pour faire du scratching et envoyer les meilleurs sons. Ils ont aussi envie, disent-ils, de se faire tout simplement plaisir.
Partenaires complémentaires.
Des papillons dans le ventre, du bon stress, quelques questions, pas de doute, et une bonne dose d’adrénaline… le tout combiné est le sentiment qui anime Michael Chang à dix jours de son retour dans le deejaying. À 53 ans, il arbore le look soigné du jeune quinqua dynamique, directeur de son entreprise, une agence de publicité et de design. A priori, on n’imagine pas ce père de famille casque à l’oreille, modifiant la vitesse de la musique et balancer du bon son pour faire vibrer une piste. Pourtant, Mister Chang a la musique dans son ADN. Et comme il le dit, il attend le jour J avec une “certaine excitation”.
À 55 ans et un t-shirt qui scintille (Ndlr : il est 11h du matin), même si on ne connaît pas Jean-Paul Cerdor, il y a quelque chose en lui qui trahit le lien qui l’unit à l’univers musical. Contrairement à son ami et complice, Jean-Paul Cerdor, papa d’un petit garçon de 7 ans, n’a jamais quitté les soirées clubbing. Il a surfé sur toutes les vagues pour être en première ligne lorsque l’ambiance electro a remplacé la déco funky des boules à facettes. Aujourd’hui, les logiciels, il les maîtrise. Alors, pour ce qui est du rendez-vous du 27, c’est zéro appréhension pour l’homme qui a une bien jolie collection de vinyles. Mais, retrouver son partenaire particulier (Ndlr : clin d’œil au groupe français new wave), celui qui a une bonne dose de savoir-faire est le moment qu’il a hâte de revivre. “Quand chacun de nous avait fait sa route, j’ai travaillé avec d’autres DJ, avec qui cela s’est très bien passé. Mais avec Michael, c’était différent. Nous étions complémentaires”, dit Jean-Paul Cerdor. Michael Chang ajoute : “Entre nous est née une belle amitié, qui n’a jamais été interrompue.”
“On ne peut pas se louper”.
Flash-Back. Non, ce n’est pas juste une illusion et pas de mise au point ici ! Faisons un bref saut dans le temps. 1998. Quelques boîtes de nuit des Plaines Wilhems sont alors à la mode et sont bondées le week-end. All That She Wants, No Scrubs, Gettin’ Jiggy Wit It, King of My Castle, Samba de Janeiro, Simarik… déferlent. En attendant que les CD les évincent, les cassettes ont encore bonne mine. DJ Best, le label Chang-Cerdor, marche bien. Des cassettes aux platines, le duo passe vite en boîte de nuit. Sa notoriété installée, il cartonne avec des tubes house et de l’époque remixés ainsi que ceux de la précédente décennie : THE ERA de la musique. Les deux jeunes loups, qui ont grandi au son des années 80 et qui le connaissent par cœur, se forgent sous les spotlights du Queen’s Club.
Retour au présent. Vingt et un ans après, Michael Chang concède : “Je veux recréer cette ambiance.” Jean-Paul Cerdor poursuit : “On a envie d’animer comme à l’époque, à une période où l’animation ne se résumait pas à la présentation des titres, mais était une interaction avec le public.” Pour les deux complices, ce retour démontrera, sans aucune prétention, qu’ils n’ont pas à rougir des années qui les séparent des jeunes DJ. “Quand on mixe un titre des années 80, le beat per minute, soit la vitesse du mixage, doit être respecté pour ne pas déformer la chanson. Quand on a vécu cette époque et qu’on connaît le beat des chansons par cœur, on ne peut pas se louper. C’est notre point fort !”, précise Jean-Paul Cerdor. “Tout est une question de subtilité”, relève Michael Chang. “Nous avons vu l’éclosion de la new wave, du free style, de l’Italo dance, de la chanson française des années 80.”
Le réveil d’une addiction.
Après quelques années au Queen’s Club, les deux DJ tentent une nouvelle et brève aventure dans une autre boîte de nuit avant que leur route ne se sépare. Michael Chang fait un passage à la radio nationale et crée parallèlement son agence, MC Design. En 2004, c’est tout réfléchi : il prend ses distances de la table de mixage et raccroche le casque de DJ. Bien des années plus tard, c’est-à-dire récemment, un de ses fils lui demande de lui acheter de quoi mixer des sons. Cette demande réveille en lui une addiction dont il croyait s’être débarrassé. “Il rêve d’être DJ ! J’ai essayé de le convaincre de se consacrer d’abord à ses études. Mais il n’en a rien été. Et, comme au fond de moi, je voulais aussi reprendre le mixage, j’ai cédé à sa demande. Je lui ai acheté du matériel et, un jour, pour le fun, j’ai posté une vidéo de ce que nous avions fait ensemble.” Les réactions ont été positives : “On m’a demandé : à quand le retour ?”
Boosté par le plébiscite, le chef d’entreprise n’a pas à cogiter longtemps avant que son ami lui fasse part, au cours d’une conversation, qu’encouragé par des anciens fidèles de leurs soirées, lui aussi souhaiterait faire un come-back. Mais les deux ne reprennent pas les platines que le temps d’une apparition nocturne. “Si je m’étais dit que j’étais peut-être un peu âgé pour le deejaying, j’ai depuis changé d’avis !”, confie Jean-Paul Cerdor. C’est aussi lui qui nous raconte comment un jour, vers la fin des années 90, alors qu’il animait une journée promotionnelle dans un magasin de meubles, un jeune homme portant une cravate l’a abordé. “C’était pendant ma pause. Quand j’ai vu Michael arriver vers moi, j’étais convaincu qu’il était le propriétaire du magasin d’à-côté et qu’il allait se plaindre du bruit”, dit-il. Michael Chang poursuit : “J’avais entendu sa voix de mon bureau et, sans le voir, il était la personne que je recherchais pour mon projet de deejaying au Queen’s.” Et c’est ensemble qu’ils écriront une page de l’histoire du clubbing à Maurice.
Michael Chang : on lui doit System R, Ras Ti Lang…
Les années 2000 ont vu apparaître des groupes, des voix et des styles qui ont marqué la décennie. System R (la formation où Mr Love a fait ses débuts), Fight Again, Gangsta Beach, Caroline Jodun ou encore un certain Ras Ti Lang ont été de ceux-là. C’est Wanadoo Production, la boîte de Michael Chang, qui avait lancé ces talents et qui les a propulsés dans l’arène musicale. Mais avec l’avènement d’autres médiums de promotion, notamment en ligne, l’industrie de la musique locale a connu des changements qui n’ont pas été sans répercussion dans le secteur de la production. Wanadoo n’est plus qu’un souvenir, mais pas la voix des artistes que le label a mis en lumière.