Il a été l’un des premiers cuisiniers à avoir anobli la kwizinn tipik de Maurice. Dix-sept ans après le décès de ce grand Mauricien, ses enfants ont décidé de rééditer l’un de ses ouvrages de référence, La vraie cuisine mauricienne. Faisant partie du patrimoine, les saveurs de Guy Félix sont offertes aux gourmands et aux gourmets dans de grandes portions. Photographiées par Christian Bossu-Picat, les recettes choisies ont été réalisées par le Chef St-Mart. Le livre sort cette semaine chez les Éditions de l’Océan Indien.
Voilà un péché mignon pour lequel l’on consentirait d’aller se faire rôtir à point sur du feu de bois en enfer. En attendant, l’on se délecte de l’annonce de la réédition de La vraie cuisine mauricienne de Guy Félix. Un ouvrage qui fera office de bible pour les gourmets et les gourmands adeptes de grandes saveurs authentiquement locales. Surtout si tout cela est béni d’un bon satini pom damour ou d’un achard du terroir saupoudré de graines de meti, comme on le fait si bien ici et surtout pas ailleurs. “L’homme ne vit pas seulement de pain mais aussi de sardines et de piments confits”, est-il précisé dans un entrefilet dans la biographie de Guy Félix. On peut déjà sentir venir l’eau à la bouche. Ceux qui ont connu, vu ou entendu parler de lui savent que ce bonhomme avait l’art et la manière de faire les choses. Il est l’un de ceux qui ont su restituer toute sa respectabilité à la cuisine traditionnelle mauricienne, au point d’anoblir le pwason sale sounouk, tandis que son sive ti-vites pouvait faire le fier devant les créations des pontes de la haute gastronomie.
Régaler les chics et les cholo.
Tel était cet homme auquel ses trois enfants rendent un vibrant hommage à travers ce livre de référence qui s’offre un beau lifting. Il compte 177 pages, alors que la version de 1987 n’en avait que 82. Onze recettes inédites s’ajoutent à la riche collection d’origine. “Nous avons choisi les recettes préférées de papa”, confie Carine Félix-Liger à Scope pour expliquer le choix des présentations. Il y en aura pour tous les goûts et de quoi régaler à satiété les plus exigeants, qu’ils aient le palais fin, qu’ils soient chics, bling, cholo ou gro fey.
Pour sublimer les créations de Guy Félix, les photos de ce livre ont été réalisées par nul autre que Christian Bossu-Picat. Les recettes, qui sont inspirées des incontournables de la kwizinn tipik, ont été réalisées et revisitées par un chef de la nouvelle génération, le chef Thierry St-Mart du Hennessy Park Hotel. Ce dernier a pris quelques libertés qui n’ont pas déplu aux héritiers de Guy Félix : “Papa aurait été content de voir la tournure que cela a pris”, affirme Carine Félix-Liger. Cette nouvelle édition de La vraie cuisine mauricienne est sortie chez les Éditions de l’Océan Indien. Le lancement a eu lieu en début de semaine.
Guy forever.
Voilà comment Guy Félix revient dans l’actualité en passant par la grande porte, comme on l’aurait fait pour un beau plat ramené directement de la cuisine, avec tout le cérémonial nécessaire pour le célébrer. Guy Félix, “c’est la belle cuisine traditionnelle”, nous rappelle sa fille. Elle se souvient encore de toute la vie qui animait la cuisine familiale où cochons marrons, tang, cerfs étaient souvent déposés par des amis. Ceux-là étaient toujours à la table des Félix, où il était de coutume d’avoir des invités en permanence. Il cuisinait aussi pour les grandes occasions et a été l’un des chefs les plus médiatisés de son époque.
Si Guy Félix était traité comme un spécialiste en matière de cuisine, il était cependant professionnellement engagé dans un tout autre domaine. Ces brillantes études au collège Royal de Curepipe lui ont permis de faire des études supérieures en Angleterre, d’où il est revenu diplômé en physiothérapie, hydrothérapie, chiropodie et pédicure. Physiothérapeute à l’hôpital de Candos, il deviendra plus tard le chef de cette unité au ministère de la Santé et sera engagé auprès des athlètes.
Un grand humaniste.
“Papa était avant tout un grand humaniste.” Il était normal pour lui de cuisiner et de partager avec autrui. D’où ses livres de recettes, où il livrait ses secrets sans hésitation afin que les bonnes saveurs soient à la portée de tous. Tel le Moon Fan, décrit par Carine Félix-Liger comme une de ces recettes qui n’ont aucune barrière, la cuisine de Guy Félix prenait le meilleur des différentes cultures qui se retrouvent à Maurice. Ses nombreux voyages furent des occasions pour tenter d’autres expériences et élargir ses horizons.
Relancer La vraie cuisine mauricienne était un devoir pour les héritiers de ce citoyen engagé, décoré de la République et qui a été fait citoyen d’honneur de Quatre-Bornes à titre posthume. Un émouvant hommage rendu à un Mauricien d’exception qui n’hésitait pas à découvrir son deksi afin de laisser se répandre le fumet de son savoir-faire à l’intention des différentes générations qui ont faim de belles choses.
Destiné aux Mauriciens comme aux étrangers, le livre est disponible en librairie.
Le premier chef de Scope
Pour faire un “Bouillon malgache”, il faut de la viande de bœuf, des oignons de Bombay, des bred chinois, des piments rouges et des verts, entre autres ingrédients. Le secret de cette recette réside dans son temps de cuisson et l’ordre de mélange des épices. Elle se mange avec du riz et un chatini de coco, conseille le chef.
Le “Bouillon malgache” a été la toute première recette publiée dans Scope, il y a 30 ans. Elle était présentée par Guy Félix. Sous la rubrique “Coin Cuisine : La vraie cuisine mauricienne”, il proposait dans cette première collaboration les recettes du bol devire, de la compote de pommes et d’un lait d’amande.
Guy Félix a été présent dans les colonnes de Scope pour partager ses recettes, qui restent dans nos archives.