Alors qu’il s’était bien préparé pour attaquer la rentrée parlementaire mardi, Bobby Hurreeram se retrouve depuis vendredi soir rétrogradé à son ancien poste de Chief Whip. L’annonce lui a été faite par le Premier ministre lui-même lors d’une rencontre vendredi au PMO. Si aux yeux de la population ce changement de statut de Deputy Speaker au Chief Whip la veille de la rentrée parlementaire est perçu comme une régression, voire une humiliation, Bobby Hurreeram estime, lui, que « le PM étant le seul maître à bord, c’est lui qui décide de qui il a besoin et dans quelle position. » Il répond aux questions de Week-End, en nuançant ses véritables sentiments.
l M. Hurreeram, que s’est-il passé ? Expliquez-nous cette démission.
C’est une décision du Premier ministre. Moi, je reste un homme de parti et je suis disposé à travailler à peu importe le poste où le PM pense qu’il a besoin de moi. Je pense avoir la capacité to lead from any chair. Ce qui est important, c’est la contribution que je peux apporter à faire avancer les objectifs fixés par mon PM et mon gouvernement dans l’intérêt du peuple mauricien et du pays.
l Comment et quand avez-vous appris la nouvelle ?
Je l’ai appris lors d’une rencontre vendredi en début de soirée durant laquelle le PM m’a demandé de démissionner comme Deputy Speaker et ce matin il m’a nommé pour le poste de Chief Whip.
l Quelle a été votre réaction ?
Étant un homme de parti et comme je crois en mon Premier ministre, il n’était même pas question de discussion.
l Qu’est-ce qui a motivé sa décision ?
Le PM étant le seul maître à bord, c’est lui qui décide de qui il a besoin et dans quelle position. La politique reste une situation très dynamique, les changements sont tout à fait normaux. Le PM dans toute sa sagesse décide ce qui est mieux pour le gouvernement et pour le pays, et pour le bon déroulement des travaux.
l Il doit quand même y avoir quelque chose qui a motivé cette décision de Pravind Jugnauth. Une action quelconque que vous auriez faite ou quelque chose à venir ?
Il faudra lui demander.
l Est-ce à dire que la confiance que vous faisait le PM en vous nommant en juillet dernier au poste de Deputy Speaker a baissé ?
Non. Je ne pense pas qu’il y ait des positions qui requièrent plus de confiance que d’autres. C’est tout simplement un réarrangement pour avoir l’équipe que le Premier ministre estime la meilleure.
l Vous dites, vous-même, que vous avez la capacité to lead from any chair. Est-ce que cela signifie que vous n’êtes pas capable, selon le PM, d’occuper le poste de Deputy Speaker ?
Non, je ne pense pas que c’est cela. Au sein de notre gouvernement, ce ne sont pas les talents ou les compétences qui manquent. Le PM a une tout autre vision de son gouvernement que nous, nous ne voyons pas. Il fait ses choix selon ses propres critères établis et agit en conséquence. Nous sommes là dans une équipe et nous fonctionnons en travaillant pour l’avancement. Cet état d’esprit ne va pas changer.
l Est-ce que ce sont vos compétences qui ont motivé le choix de Pravind Jugnauth ?
C’est ainsi que fonctionne Pravind Jugnauth. Des fois les gens parlent de blue-eyed boy, etc. Je dirai haut et fort que c’est mal connaître Pravind Jugnauth si l’on croit qu’il peut avoir d’autres considérations. Pravind Jugnauth fait confiance à ceux, autour de lui, qu’il pense pouvoir deliver et apporter leur contribution pour faire avancer le pays.
l Où avez-vous fauté alors ?
La question de faute ne s’est jamais posée. C’est une décision du Premier ministre.
l En juillet, le PM avait ses raisons de vous choisir pour le poste de Deputy Speaker et aujourd’hui qu’il vous a délogé, il doit aussi avoir d’autres raisons. Qu’est-ce qui a motivé cela ? Est-ce une question de personnalité ?
Ce n’est pas une question de «délogement»et encore moins de personnalité. La politique étant très dynamique, c’est tout à fait normal de bouger, de changer, de voir quelles sont les permutations qui peuvent mieux marcher et comment faire pour qu’on ait la meilleure équipe qui fonctionne. C’est le PM qui fait le choix de son équipe. Je n’ai pas de question à poser à ce sujet.
l Comment qualifierez-vous alors le leadership de Pravind Jugnauth ?
Nul n’est prophète en son pays. Dans 15,20,25 ans, on réalisera qu’on a eu un grand visionnaire comme Premier ministre. Si SAJ a été le père du développement économique, Pravind Jugnauth sera le père de l’île Maurice moderne. Clairvoyant, bosseur, intelligent, un leader honnête, sincère, éclairé. Je suis admiratif devant autant de clairvoyance.
l Vous vous étiez préparé pour la rentrée, vous aviez même fait votre homework. Mais voilà qu’à deux jours de la rentrée parlementaire, vous changez de statut. Quel est votre état d’esprit ?
Je suis et reste serein. Je suis un team player et je vais contribuer «pareil» et autant que je peux. Certes en tant que Deputy Speaker, cela aurait été différent. Et en tant que Chief Whip, ce sera un tout autre rôle que j’ai déjà joué dans le passé et que je connais bien.
l Êtes-vous triste puisque vous n’avez pu chair qu’une seule session parlementaire ?
Triste non. Chaque étape de la vie politique, de la vie parlementaire est un challenge en soi que j’accueille à bras ouverts. Comptez sur moi pour que j’en fasse plein du rôle qui m’est attribué en ce moment. Étant croyant, je pense qu’il y a toujours une main divine qui agit et qui nous pousse dans certaines directions.
l Que retenez-vous de cette petite expérience ?
Le contrôle de soi. Dorénavant, m’étant moi-même assis sur ce siège, même si de courte durée, ma façon de voir a changé. Pour avoir été au Parlement pendant trois ans et demi avant qu’on ne me nomme Deputy Speaker, je connaissais déjà les standing orders. Mais je vous accorde que quand on est simple député, on ne les lit de la même manière. On n’analyse pas. On ne les discute pas. En tant que Deputy Speaker, on a une lecture plus assidue et différente des standing orders. Pendant les vacances, j’avais fait mon homework. Je suis même allé voir un peu sur YouTube ces grands messieurs, ce qu’ils disent, les grands rulings, etc. Et j’allais aborder la rentrée beaucoup plus serein et avec beaucoup plus d’assurance. Aujourd’hui que j’ai connu ce regard de Deputy Speaker, ma vision sur certains commentaires et comportements est différente. J’ai plus de recul.
l En tant que Deputy Speaker, votre premier et dernier coup d’éclat a été d’expulser le vieil habitué Paul Bérenger de l’hémicycle. Aviez-vous raison ou tort ou était-ce le résultat d’un manque d’expérience ?
Cet épisode est très clair dans ma tête, comme si c’était hier. C’était dommage. J’étais un peu déçu de la façon dont Paul Bérenger s’est comporté ce jour-là. Was he testing the waters ? Je ne sais pas. En tout cas, je pense que je lui a donné plusieurs chances de retirer le mot qu’il avait employé. J’avais donné mon ruling concernant le mot Pinocchio qui, dans le contexte, était pour dénigrer l’autre. Me dire que c’était par manque d’expérience ou un coup de tête, non ! J’ai pris le temps qu’il fallait pour analyser la situation et voir sous tous les angles et finalement je devais d’agir. J’ai suspendu la séance pour que cela se calme dans l’hémicycle, mais je suis revenu, encore une fois, et je lui ai demandé de retirer ce terme. J’ai même rappelé à l’honorable Bérenger que la jeunesse le regarde dehors et de donner le bon exemple. Il n’y avait rien de wrong de retirer ce mot et de continuer le débat. Personne n’aurait aimé se faire appeler whatever be the name. J’ai donné plusieurs chances à Paul Bérenger, mais je ne pouvais pas faire plus. Il fallait agir.
l Votre rétrogradation au poste de Chief Whip est-elle confirmée ?
Je n’ai pas encore eu de document officiel qui m’en informe, mais le PM a fait une déclaration en ce sens.
l C’est le nom d’un ex-président dissident qui a rouvert les portes du Sun Trust qui a sera proposé au poste de Deputy Speaker. Votre avis ?
Au MSM, on fonctionne en équipe. Je pense que celui qui est pressenti a été quand même le président du MSM à un moment donné. C’est quelqu’un qui commande beaucoup de respect parmi les militants du MSM. Si on devait avoir quelqu’un avec une certaine indépendance d’esprit, le choix est très bien. Personne ne questionnera l’indépendance d’esprit de M. Lesjongard.
l Vous voterez pour lui mardi ?
Son nom sera proposé et, oui, avec plaisir je voterai pour lui.
l Quels sont les conseils que vous auriez à lui donner ?
Pas grand-chose. Au contraire. C’est quelqu’un de qui moi-même j’ai eu l’occasion d’apprendre. Pour moi, l’expérience parlementaire, ministérielle, politique et sa sagesse, etc. font de lui quelqu’un qui fera honneur à ce poste. Et il nous le prouvera en temps et lieu.
l Peut-on être vraiment neutre comme l’exige le poste de Deputy Speaker ?
Je l’ai été. Mais comprenez qu’un Speaker ou un Deputy Speaker ne sont pas appelés à prendre position contre l’un ou l’autre. Il sont censés faire respecter les règles. Des règles qu’ils n’ont pas inventées mais qui sont écrites. Il y a un scheme, il y a les standing orders de l’Assemblée nationale and we go according to the rules. Les députés ont leur temps pour poser des questions, ils posent leurs questions et obtiennent les réponses. Le Speaker ou le Deputy Speaker n’ont pas de contrôle sur ce que va dire ou ne pas dire un ministre. De toute façon, il y a le public qui regarde, il y a la presse qui est là, et le public tirera les conclusions qu’il faut.
l Pensez-vous que Joe Lesjongard pourra “mâter” cet hémicycle ?
“Mâter” n’est pas forcément le mot. Ce n’est pas le travail du Speaker ou du Deputy Speaker. À chacun sa conscience pour respecter les institutions et le Parlement qui est le temple de la démocratie. Nous ne sommes pas des enfants au sein de l’hémicycle. Ce n’est pas une cour de récré. Quoi que nous ayons tous le devoir de “mâter” comme vous dites cette indiscipline. Chaque parlementaire a le devoir de faire respecter le niveau, de faire le travail qu’il est appelé à faire dans l’intérêt public, à poser des questions pour éclairer la population sur certaines zones d’ombre et obtenir des infos dans l’intérêt public. Il ne faut pas que les parlementaires oublient qu’aujourd’hui le peuple nous voit, le peuple juge pas seulement sur ce qu’on dit au Parlement en termes de questions ou de débats. Le peuple juge aussi le comportement que nous avons au sein de l’hémicycle. Nous avons tous le devoir, à travers des comportements, des débats sérieux et du gentlemanship de uphold the dignity of the House.
l On évoque votre changement de statut pour optimiser votre retour actif et percutant sur le terrain en marge des prochaines élections.
Je le prends comme un compliment. C’était la décision du PM, il a ses raisons qui l’ont motivé. Je m’en tiens à ça.
l Vous avez été Deputy Chairman of Committees, PPS, Chief Whip, Deputy Speaker et re-Chief Whip désormais. What’s next pour Bobby Hurreeram ?
En temps et lieu, on verra. Je joue dans une équipe et le jour où mon entraîneur me mettra dans une autre position pour jouer, tout ce que je sais, c’est que je vais jouer avec la même vigueur, la même loyauté, la même agressivité et la même détermination.
l Vous allez donc reprendre votre bâton de pèlerin en tant que porte-parole du gouvernement lors des conférences de presse hebdomadaires et lors des talk-shows pour être cet ardent défenseur du gouvernement et pourfendeur de l’opposition ?
Il n’y a pas vraiment à défendre ou à critiquer. Mais de temps en temps, il faut bien remettre les pendules à l’heure et dire ce que, malheureusement, les médias ne disent pas en faveur du gouvernement. Il faut bien que quelqu’un vienne dire ce qu’il y a à dire.
l Les réflexes partisans que vous aviez dû mettre en berne le temps d’occuper le poste de Deputy Speaker sont donc de nouveau “on” ?
Quand il y aura à répondre et remettre les pendules à l’heure, quand les amis de la presse feront appel à moi pour éclairer la population sur certains points, oui, je me porterai volontaire. Il faut juste accepter la réalité et la regarder en face : que c’est le meilleur gouvernement que le pays ait connu depuis des années.
l Redescendre du perchoir, est-ce facile ?
Oui, c’est pas comme si j’y étais depuis toujours. Pour moi, le challenge, je l’accepte, je le prends. Je me plaisais bien à mon poste de Chief Whip et je vais être honnête: ça me fait plaisir d’y retourner. D’ailleurs, je remercie le PM pour cela. Le gouvernement a beaucoup de projets de loi qui doivent venir, il y en a pas mal qui vont moderniser ce pays. On va se concentrer dans le travail, positif et productif. Et j’espère que l’opposition va y contribuer et qu’elle quittera cette façon de faire très démagogique de patauger dans la boue politicienne quand il s’agit de l’intérêt du pays. Je souhaite qu’au Parlement nous allons débattre et non nous battre dans la boue politicienne.
l Il y a des projets de loi qui n’arrivent toujours pas, comme le freedom of information, le financement des partis, declaration of assets. Vous qui êtes dans le secret des dieux, voyez-vous l’alliance dont vous faites partie les mettre en route pendant l’année qui nous sépare des prochaines élections générales ?
D’abord, je ne suis pas dans le secret des dieux. Déjà, le mandat d’un gouvernement c’est cinq ans. Nous sommes arrivés à trois ans et demi, il nous reste un an et demi encore. Il y a beaucoup de lois qui ont déjà été votées. On ne peut pas venir avec tout en même temps. Je n’ai absolument aucune raison de douter que ces projets de loi vont venir en temps et lieu. Vous n’êtes pas sans savoir que pour ces projets de loi, il y a pas mal de travail à faire en amont. Mais dans ce que vous avez mentionné, je sais que c’est déjà in the making. Et je pense que les ministres concernés présenteront les lois en temps et lieu.
l Quel est votre avis sur le débat avorté sur la réforme électorale ?
Avorté, je ne suis pas sûr. Malheureusement, certains n’ont pas choisi de jouer le jeu démocratique et apporter leur contribution. Je ne veux pas entrer dans un débat partisan, mais je note, comme tout le monde, que le MMM a dit qu’il ne va pas envoyer ses propositions, tout le monde étant déjà au courant de ses propositions. Je ne pense pas que c’est une façon de procéder. Le gouvernement a fait des propositions et cela aurait été bénéfique pour le pays que les autres acteurs, les autres partis politiques, la société civile, apportent leur contribution, viennent avec des propositions concrètes, sans tomber dans la démagogie. De même, sans faire la leçon, il y a aussi une section de la presse qui tombe dans cette facilité du sensationnalisme, au lieu de contribuer réellement au débat. On dit que du choc des idées que jaillit la lumière, mais ce choc des idées n’a pas eu lieu. C’est ce que je déplore. On tombe trop vite trop facilement dans l’argumentaire politicien et on oublie de regarder plus loin pour dire ce qu’on souhaite pour la nouvelle génération, comment moderniser notre pays, donner un coup de main dans le bon sens. Les élections sont derrière nous, les prochaines arriveront quand elles arriveront, mais entre-temps, on aurait pu se placer au-dessus et contribuer pour l’avancement du pays. Chose qui, dommage à Maurice, n’arrive pas.
l Et le redécoupage électoral qui alimente les passions. Qu’en pensez-vous ?
There is some other thinking. On peut tous se mettre autour d’une table, en discuter et prendre les décisions qu’il faut dans l’intérêt du pays. Dommage que certains partis politiques en profitent pour créer de la confusion, pour créer cette ambiance un peu malsaine. À qui profitera le crime ? suis-je tenté de dire. Nous, nous voulons faire progresser le pays. Le PM a dit à chaque fois qu’il se démène pour faire de Maurice un high revenue country. Il ne faut pas qu’à l’intérieur il y ait des gens qui cherchent toujours à alimenter des feux dont on aurait bien pu se passer. L’Electoral Boundaries Commission est en train de faire un travail dessus. Attendons voir les propositions.
l Cette rentrée parlementaire est aussi la rentrée politique. Comment situer la popularité de l’alliance dont vous faites partie ?
Pour répondre à cela, il faut voir aussi ce que le pays est devenu, un grand chantier à ciel ouvert. Il y a des travaux partout. Le Mauricien vit mieux. L’écart entre les plus riches et les pauvres est en train de diminuer. Le taux de chômage est en train de diminuer. Certainement, nous ne sommes pas le nombril du monde, nous sommes touchés par ce qui se passe ailleurs, les décisions de Trump, le Brexit, la situation au Moyen-Orient. Tout cela, nous le payons cash et n’avons pas vraiment les moyens de nous en protéger. Mais malgré tout, nous aurons une croissance de 4% ou plus peut-être. Aujourd’hui, les grandes institutions comme la Banque mondiale, le FMI nous font confiance. Les grandes puissances nous respectent. Le gouvernement se donne les moyens qu’il faut pour développer le pays, et cela, la population le voit et le sait. Aujourd’hui, sans langue de bois, je peux dire que la population mauricienne a déjà choisi qui sera le prochain Premier ministre, et ce sera nul autre que Pravind Jugnauth.
l Que pensez-vous du choix annoncé du MMM et du PTr d’aller seuls aux prochaines élections ?
Je pense qu’il y a beaucoup de bluff dedans. Déjà, Bérenger est connu pour dire ce qu’il ne pense pas et pour faire ce qu’il ne dit pas. Pour moi, c’est quelqu’un en contradiction totale vis-à-vis de lui-même. Navin Ramgoolam est quelqu’un qui a perdu toute crédibilité sur l’échiquier politique. Il essaie tant bien que mal de garder la tête hors de l’eau et tente des coups d’éclat ici et là. Mais je ne prends pas trop au sérieux ce qu’ils disent. Dans leur ultime attempt pour essayer d’affronter le MSM avec un Pravind Jugnauth jeune, dynamique, qui a déjà un bilan éloquent, que ce soit en termes d’infrastructures au niveau du pays ou des indicateurs économiques, éventuellement, peut-être finiront-ils ensemble. À mon avis, ces «aller seul» du PTr et du MMM s’adressent l’un à l’autre. Ce sont des messages qu’ils s’envoient à travers la presse en se lançant des annonces pour faire comprendre : moi je vais seul, toi tu vas seul, donc, pourquoi pas tous deux ensemble. Ils ne sont que les deux à se dire cela. Ils auraient pu se téléphoner et se le dire en privé. Nous, on peut bien s’en passer.
l Et votre parti compte poursuivre l’aventure avec le ML seulement ? Ou d’autres alliances sont-elles encore possibles ?
Je ne peux pas répondre à cela. Ce que je peux dire à ce stade, c’est que nous avons une alliance solide qui donne des résultats. Pourquoi changer une équipe qui gagne ?
l Votre opinion sur l’entrée de la drogue dans les star schools du pays ?
Ce n’est pas aujourd’hui que la drogue est dans les collèges. Je ne pense pas à une détérioration et je ne suis pas en train de banaliser les choses. Certainement, c’est alarmant et nous en sommes conscients. Mais aujourd’hui, il y a plus d’informations qui sortent. Depuis que le gouvernement MSM-ML est au pouvoir, c’est là qu’on a commencé ce gros nettoyage qu’il fallait faire. Nous avons eu le courage politique de venir avec la commission d’enquête que Navin Ramgoolam a toujours refusée, parce qu’il refusait de voir en face ce problème de drogue. Le PM s’est lancé dans un combat personnel, mettant sa vie et celle de sa famille en danger pour sauver cette jeunesse des méfaits de la drogue. Néanmoins, aujourd’hui, quand on saisit les drogues et ferme les portes, les trafiquants trouvent d’autres astuces, avec désormais la drogue synthétique. Il ne faut pas tout mettre sur le dos des autorités. Les profs font ce qu’ils peuvent dans les classes, mais les parents doivent aussi s’impliquer. Le combat contre la drogue se gagnera si tous les acteurs, la société civile, les profs, les parents, la presse et les politiciens se mettent ensemble pour trouver une solution.
l Malgré des plaintes de vos collègues du parti touchés par le rapport Lam Shang Leen, ne pensez-vous pas que des recommandations urgentes doivent être appliquées? La démarche du PM aura-t-elle finalement été vaine ?
Bien au contraire. Le PM, lui-même , étant de la profession légale et avec une clairvoyance exceptionnelle, veut attaquer le problème en profondeur. On ne va pas venir guérir le cancer avec du Panadol. Je ne pense pas que courir dans toutes les directions changera quoi que ce soit. Il ne faut pas oublier qu’aujourd’hui nous avons affaire à des trafiquants intelligents qui utilisent et manient bien la technologie, qui sont conscients des lois et qui ont aussi les moyens pour contrer la loi. Il faut être très stratégique dans ce cas-là. Les mesures prises par le PM auront les résultats qu’il faut et ce sera beaucoup plus en profondeur.
l Autre situation inquiétante dans le pays, la montée de la violence. Dans les couples, envers les forces de l’ordre. La raison derrière, selon vous ?
Aujourd’hui, comme à travers le monde, il y a une perte des valeurs. Les gens deviennent un peu trop égocentriques, on perd cette notion de partage, de fraternité. Qu’on le veuille ou non, ce sont les petites histoires de nos grand-mères qui, d’une façon très subtile, nous ont inculqué des valeurs. Aujourd’hui – aléa d’une société moderne –, les parents travaillent. Quand ils arrivent, ils sont fatigués et les enfants sont livrés, non pas aux grand-mères pour leur éducation, mais à Google, qui se charge de répondre à toutes les questions de ces jeunes. Heureusement que le gouvernement de Pravind Jugnauth a pu réformer notre système d’éducation et qu’il y a désormais une holistic approach. Par ailleurs, il ne faut pas voir le problème qu’on a aujourd’hui comme un cliché qu’on a pris à un moment donné, mais voir d’où cela découle. Ce qu’on est en train de vivre comme violence aujourd’hui, c’est le fruit des années de frustration accumulée par la jeunesse à qui on a volé son enfance. Les jeunes ont été mis à l’épreuve du CPE, du SC, du HSC, et les pressions se sont accentuées les unes après les autres. Il fallait se batailler pour avoir un boulot ou avoir un diplôme des universités marrons qui livraient des certificats qui ne valaient rien du tout C’est toute cette frustration qu’on a accumulée pendant des années dont nous témoignons aujourd’hui.
l Le PM multiplie les rencontres avec les groupes religieux…
Toutes les composantes de notre société, jeunes, moins jeunes, de différentes communautés de notre nation arc-en-ciel demandent à rencontrer le PM. Je trouve excellent qu’elles veuillent le voir pour exprimer ce qu’ils souhaitent, et c’est excellent d’avoir un Premier ministre qui est à l’écoute, disponible et qui a du temps pour rencontrer les différentes composantes pour la société mauricienne.
l Il a du temps pour ce type de rencontre, mais on voit que plusieurs corps paraétatiques restent sans direction. Mauritius Duty Free Paradise ou la MBC, par exemple…
Pour MDFP, la personne qui avait été nommée est partie pour des problèmes de santé je crois. Il y a un chairman très capable qui est en train de faire le travail. À la MBC, M. Ramsurrun, que je ne connais pas personnellement, assume plutôt bien l’intérim, avec, par exemple, des émissions comme Qui veut gagner des millions qui réunit la famille. Ce qui est important, c’est de put the right man in the right place. Il faut prendre le temps qu’il faut pour choisir ces personnes. Le Cabinet prendra le temps qu’il faut pour bien filtrer.
l Le mot de la fin ? Peut-être à l’adresse des parlementaires…
Allons redonner à ce Parlement ses lettres de noblesse. Allons, ensemble, inspirer cette jeunesse mauricienne. Allons regarder à contribuer et que nous devenions des exemples, des role models pour ces jeunes qui nous regardent. Quand on est au Parlement, gardons en tête que la jeunesse mauricienne nous regarde. Ayons tous un comportement honorable.