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Vigiler, sans cesse

Et au milieu de tout ça…

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Signe des temps? Il y a eu cette semaine à Paris une conférence internationale de quatre
jours dédiée au climat avec en point d’orgue le One Planet Summit le 12 décembre.
Conférence qui a réuni chefs d’Etats, organisations internationales et entreprises autour
de la question clé du financement de la lutte contre le réchauffement climatique. Et à
laquelle a participé le Premier ministre mauricien.

On pourrait être tenté de se laisser aller au cynisme. Encore un sommet? Pour quoi
faire? Pourquoi encore perdre son temps à ce genre de rendez-vous alors qu’il a suffi
d’une décision unilatérale du président américain, en juillet dernier, de retirer son pays
de l’Accord de Paris pour que les avancées promises soient menacées.

Et pourtant. Pourtant il faut prendre la mesure de l’enjeu crucial que représente cette
conférence. Décidée justement après l’annonce par Donald Trump que les États-Unis
se retiraient de l’Accord de Paris, elle intervient exactement deux ans après la signature
de cet accord qui visait à contenir la hausse moyenne de la température sous le seuil
critique des 2°C. Celui qui l’a convoquée, le président français Emmanuel Macron, a eu
à ce sujet des mots très directs: «On est en train de perdre la bataille. On ne va pas
assez vite et c’est ça le drame. On doit tous bouger car on aura tous à rendre compte».

Le but déclaré, c’était donc de faire entrer l’Accord de Paris dans l’économie réelle.
Concrètement, douze mesures ont été annoncées. Parmi, la décision de la Banque
mondiale de cesser de fi nancer l’exploration et l’exploitation de pétrole et de gaz à
partir de 2019. Et l’engagement des pays du Nord à porter à 100 milliards de dollars par
an d’ici à 2020 leurs fi nancements pour le climat aux pays du Sud. Ceux-ci réclamant
des assurances par rapport à cette promesse pour pouvoir s’adapter aux impacts des
dérèglements climatiques.

Car nous sommes tous menacés. Et il suffi t, par exemple, de regarder évoluer l’état de
nos plages pour en avoir une indication. Combien, de plus en plus, elles se rétrécissent,
et pas seulement sous la pression de promoteurs trop avides.

Mais on tente toujours, à tant de niveaux, de nous imposer une vision fort simpliste
de notre «développement». Le cas du très contesté projet hôtelier de Pomponette,
ces jours-ci, en témoigne amplement. Il ne s’agit pas que de nous dire qu’on ne saurait
s’opposer à la construction de nouveaux hôtels parce que cela représente des opportunités
d’emploi. Alors que le Premier ministre Pravin Jugnauth s’est targué, au One Planet
Summit à Paris cette semaine, du fait que Maurice est devenue un pays à hauts revenus, sans doute devrions-nous nous pencher sur les salaires et conditions de travail qui sont pratiqués dans une partie de notre secteur hôtelier. La grève courageusement déclenchée ces dernières semaines par les employés de l’hôtel Sofitel à (Flic en Flac) en dit beaucoup sur la situation d’exploitation qui peut prévaloir dans ce secteur. Si certains grands groupes sont résolument engagés dans la construction humaine, qui est aussi nécessaire à la préservation du légendaire «accueil» qui fait le succès de l’hôtellerie et du tourisme mauricien, ce n’est pas le cas de tous.

Et les inégalités deviennent criantes. C’est aussi ce que dit le tout premier rapport publié ce jeudi, 14 décembre, par les chercheurs réunis au sein du projet World Wealth and Income Database (WID). Qui montre que les inégalités dans le monde sont en hausse constante depuis quarante ans. Que les 1% les plus riches ont profi té deux fois plus de la croissance des revenus que les 50% des plus pauvres. Et qu’entre les deux, soit pour les classes moyennes, les revenus ont stagné ou baissé.

«Dans les dernières décennies, les pays sont devenus plus riches mais les gouvernements
sont devenus plus pauvres», fait ressortir le rapport. Dans la plupart des pays riches, qu’il
s’agisse des États-Unis ou du Japon, le patrimoine public est devenu négatif (avec plus de
dette que d’actifs). Ce qui «limite la capacité des États de réguler l’économie, redistribuer
les revenus et freiner la croissance des inégalités».Une semaine. Deux événements qui nous disent à quel point notre monde est menacé si nous n’agissons pas.

Alors au moment de voter aujourd’hui, sans doute est-ce aussi ce qu’il convient de se
demander. Qui nous parle de ces choses? Au-delà des querelles de personnalités, au-delà
de l’expression d’égos parfois sur-dimensionnés, au-delà de sempiternelles gué-guerres
et pinaillages pour savoir qui a trahi ou pas, se demander. Qui nous parle des enjeux
cruciaux de l’humain et de la planète, dans notre petite île et par rapport au monde?

A la Villette à Paris en ce moment, on peut voir une très belle exposition consacrée à la
chanteuse Barbara. La grande dame brune qui chanta L’aigle noir, Gottingen ou Dis quand
reviendras-tu. Outre de se consacrer à la scène, Barbara eut aussi des engagements très
forts. Pour la lutte contre le sida. Aux côtés des sans-abri. En faveur de plus de justice
sociale. Mettant en avant, avec ce sens des mots qu’elle avait, la nécessité de «vigiler»,
sans cesse. Belle déclinaison pour dire la nécessité d’une vigilance active, inlassablement.
Parce que nous sommes tous responsables de ce qui nous arrive.

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